Jusqu’en avril, Étienne Daho l’aime pop à la Philharmonie. Une exposition orchestrée par le « jeune homme moderne » éclaire l’imaginaire de la chanson populaire au fil de photos cultes. À l’expo s’ajoute l’écoute, celle d’un nouvel album mélancolique, Blitz. Paris semble plus Daho que jamais. Mais ne l’a-t-il pas toujours été ? Retour en cinq lieux sur son Paname à lui.
Café de Flore
Le clip en noir et blanc de Le Flore dévoile un dandy cool discutant en terrasse avec ses amis vestonnés. Tout en contemplant les toiles d’une belle inconnue. « Paris c’est fun » expire le chanteur qui « traîne sans raison » au Flore pour y lire Antonin Artaud et Arthur Miller. Café-resto de Saint-Germain des Près, le Flore est l’îlot de la culture française. Sont venus s’y attabler écrivains (Huysmans, Barrès), poètes (Apollinaire, Aragon, Desnos), cinéastes (Marcel Carné) et bien évidemment le couple Beauvoir/Sartre. André Breton aimait y divaguer. Lorsque l’on écoute Daho nous vient à l’esprit le titre du bel opus du surréaliste en chef : L’Amour Fou.
Rue des Martyrs
Suivre la rue des Martyrs, c’est investir le quartier de Pigalle. Déambuler au gré des cabarets et des salles de café-concert (dont Le Divan du Monde, où se rendirent jadis Toulouse-Lautrec et Pablo Picasso). Dans sa sulfureuse chanson Des Ir, Étienne Daho vit une « saison en enfer » dans une chambre d’hôtel de cette rue autrefois investie par Maurice Ravel et François Truffaut. À deux pas du village de Montmartre, entre quatre murs moites, l’amoureux se fait martyr le temps d’un corps à corps brûlant où le désir se consume. « Incandescent, indécent, turgescent« .
Rue Durantin
C’est justement à Montmartre, dans la Rue Durantin, que l’on trouve le studio d’enregistrement privé et la maison du chanteur. C’est aussi là que l’on s’enlace à bout de souffle dans « les cordages de la nuit« . La chanson du même nom évoque une romance sanguine qui aurait lieu à quelques enjambées de la basilique du Sacré-Cœur. Dans ce lieu d’où émergent mille images : celles du french cancan, de l’hôtel Mon Amour, de Baisers Volés. Bien qu’il oscille entre Rome et Londres, Étienne Daho compose une Carte du Tendre où escales et sentiments convergent tous vers Paname. Là se love l’amour : il suffit de « traverser Paris en courant, sur la seule magie de l’instant » entend-t-on dans Jack au mois d’avril.
Rue des petits hôtels
Au fil de cette rue située à proximité de la Gare du Nord, notre regard est saisi par la façade bleutée vintage de l’Hôtel du Brabant. Dans Rue des petits hôtels, la voix suave du chanteur fait de l’endroit un songe où « les souvenirs se traînent [et] l’enfance se promène« . Un lieu d’errance où l’on vient tromper la monotonie, faute de pouvoir s’évader. Ode au voyage, la musique de Daho est un appel à quitter la capitale, l’espace d’une escale à Paris Plages, où l’on se dirige après avoir flâné le long des « Bords de Seine », nous raconte-t-il dans sa chanson éponyme. L’endroit idéal pour un flirt estival, car « à Paris Plages, Paris paresseuse, les soirs d’été sont chauds« . Ou bien l’on s’offre un Week-end à Rome – pendant que « Paris est sous la pluie« . « Paris, tu perds… Je pars. Fin » susurre-t-il enfin dans Paris ailleurs. À suivre…
Salle Pleyel
L’édition 2014 du festival Day Off a accueilli en pleine salle Pleyel l’événement Tombés pour la France, instauré par le magazine Magic. Soit la réunion sur scène de ceux et celles qui font la pop française contemporaine. Comme le suggère le nom du concert, référence au hit de 1986 (issu de l’album Pop Satori), tous ont en eux quelque chose de Daho. Ludisme pop évanescent (The Pirouettes, Granville), hybridité transgressive (La Femme), singularité d’extraterrestre (Calypso Valois, fille d’Elli et Jacno), mélancolie froide et glam (Lescop)… Après la Dahomania des années 80, il faut aujourd’hui compter sur une Génération Daho plus vivante que jamais.